Jusqu'à
la Révolution la ville est foncièrement catholique.
Des confréries existent : Dames de Charité, Demoiselles
des Pauvres, Pénitents, pour les hommes, qui, vêtus d'une
robe blanche de religieux, chantent au lutrin pendant les offices,
assurent la police de l'Église, organisent le sabbat pour chasser
les démons, assurent des permanences de prières lors
des grandes fêtes religieuses.
Au XVIIIe siècle, on compte seulement quelques
adeptes des idées nouvelles, les « Voltairiens »,
gens instruits mais dont l'influence sociale est très modeste.
Jusqu'à l'aube du XXe siècle, Oyonnax n'était
guère plus qu'une bourgade rurale : presque toutes les
habitations étaient des fermes, parfois aménagées
en logis bourgeois. Il y a avait écurie, grange, clapier-poulailler,
cuisine à vaste cheminée. Dans cette pièce était
installé le petit atelier à domicile
La nourriture était frugale : farine de maïs grillée,
pois, lentilles, haricots, fèves, choux, pain de seigle et
d'orge, parfois de blé. Des moulins existaient au Conias, au
Grand Moulin, au Moulin Carré, au Moulin Thomas (entre le parc
actuel et la rue Anatole France). Il y avait fort peu de boulangers
professionnels et les ménagères cuisaient elles-mêmes
leur pain dans des fours particuliers, payants, ou au Four Communal
(four banal), gratuit, mais qu'il fallait chauffer ; il se trouvait
alors à l'Est de la place Saint-Germain.
La lait et ses dérivés, fromages et surtout « serra »,
constituaient une part importante de l'alimentation. Matefaims et
bugnes, rissoles, célébraient les festivités,
comme la viande d'ailleurs, régal exceptionnel qu'on accompagnait
dans ces jours fastes d'un vin dont on célébrait les
vertus parfois avec emphase mais souvent avec excès.
Les cabarets, cependant, étaient déjà
nombreux. Peu fréquentés
dans la semaine, ils rassemblaient, le dimanche, de nombreux ouvriers
et, le samedi soir, de joyeuses équipes qui aimaient à
savourer de pittoresques « mâchons »
à base de tripes, de tête de veau, de pieds de porc,
d'amourettes, en les assaisonnant de plaisantes histoires, de gauloises
chansons et d'une jovialité qui montait crescendo jusqu'au
petit matin.
Dans les « boutiques »
(ateliers), on començait tôt à travailler :
5 heures l'été, 6 heures l'hiver. Au moment
des repas, on allait volontiers chez le voisin, l'écuelle à
la main, pour discuter, plaisanter, échnager des nouvelles,
etc.
La
fête de la Saint-Rambert, Patron des « Peigneux »,
débutait par une messe solennelle, alors que dehors on tirait
des coups de feu et faisait « péter
des boêtes ». Un grand banquet populaire suivait
avec discours et chansons. Un bal en plein air terminait la fête
publique, mais les réjouissances privées duraient parfois
plusieurs jours.
Les
registres de l'état civil de ce que les personnes de qualité
(nobles, bourgeois, magistrats, etc) acceptaient volontiers d'être
parrains ou marraines d'enfants issus de familles nécessiteuses.
Nombreux
étaient les habitants, mi-artisans, mi-cultivateurs, qui partaient
dans les départements du Doubs, de la Haute-Saône, en
Alsace et jusqu'en Lorraine pour « peigner le chanvre ».
Cette occupation saisonnière s'organisait au départ
d'Oyonnax, par équipes complètes, avec un chef et des
ouvriers spécialisés dans chacune des opérations.
La culture du chanvre était courante dans la région
et les tisseurs de Groissiat, Matafelon, Nantua en faisaient des draps
et des chemises d'une irréprochable qualité, inusable
richesse des trousseaux familiaux.
Les pantalons d'hommes étaient « à pont »,
la blouse de travail de rigueur. On porta très longtemps à
Oyonnax la blouse du « dimanche », qui était
bleue. Les montagnards portaient, eux, la blouse noire et le large
chapeau de feutre, noir également.
On parlait généralement le patois, dialecte original
hérité des séjours successifs de nombreux peuples.
Mais les peigneurs de chanvre avaient créé un argot
bien à eux qui mettaient leurs propos à l'abri de la
compréhension des indiscrets.
La
population d'Oyonnax
En
1608 |
500
|
En
1622 |
300
|
En
1780 |
1012
|
En
1806 |
1275
|
En
1820 |
1158
|
En
1841 |
2593
|
En
1876 |
3530
|
En
1896 |
5652
|
En
1906 |
7851
|
En
1921 |
10
013
|
En
1936 |
10
166
|
En
1946 |
10
156
|
En
1954 |
11
773
|
En
1957 |
12
300
|
Ces
chiffres témoignent à eux-seuls du développement
d'une industrie qui a su s'adapter à l'évolution des
techniques, comme aux grandes lois économiques modernes.
Source : archives de la presse locale